Les nouveaux monnayeurs
Publié le 20 janvier 2015 par Annick Rivoire
Depuis la crise des subprimes et de la dette souveraine, hackers, artistes et théoriciens se réapproprient la monnaie. Cryptomonnaies, bitcoin, financement participatif, banques du temps… Les alternatives au système monétaire fleurissent. Le magazine MCD, sous l’impulsion de l’artiste Shu Lea Cheang, propose ce mardi un rendez-vous à la Gaîté pour «Changer l’argent».
Le bitcoin est-il déjà dépassé ? Les crypto-monnaies sont-elles une alternative au principe régalien de la monnaie ? L’argent demain sera-t-il toujours aussi concentré entre les mains de quelques-uns ? Faut-il rire du Dogecoin (une monnaie alternative à tête de chien, le fameux mème) ? Ces questions sont au cœur de la dernière édition du magazine MCD (avec lequel Makery a quelques accointances, on ne cherche même pas à le cacher !). Le magazine des cultures digitales a invité en tant que rédactrice en chef l’artiste hacktiviste Shu Lea Cheang à se saisir de la question de l’argent à l’ère « post-digitale ».
« Changer l’argent », affiche la Une de ce numéro qui propose un panorama des questions les plus actuelles autour de l’économie, depuis le point de vue des théoriciens des médias aussi connus que Geert Lovink et son Institute of Networked Cultures ou Michel Bauwens de la P2P Foundation, en passant par des propositions plus ou moins radicales d’artistes hackers (Jaromil, Olivier Auber, Paolo Cirio…), à dépasser l’argent ou inventer la transaction monétaire en P2P.
«Ð is for Ðogecoin», présentation de la cryptomonnaie open source :
Mardi 20 janvier à la Gaîté, à l’occasion de la sortie du magazine, c’est un autre focus qui sera proposé : Economie solidaire de l’art est une initiative née l’été dernier en France, quand la crise des intermittents remettait sur le devant de la scène la question de l’économie de la culture et de ses acteurs. Artistes visuels, collectifs issus des nouveaux médias, curateurs maltraités faute de convention ou de réglementation… Lancée sur les réseaux sociaux, l’appel à une mobilisation pour changer la donne a reçu un écho massif. Sur le plateau média de la Gaîté, ce 20 janvier, autour de Shu Lea Cheang et Anne-Cécile Worms (directrice de MCD et de Art2M) et de l’auteur de ces lignes, quelques représentants de ce groupe informel viendront présenter l’initiative pour la première fois IRL.
Côté labs, ce sont les crypto-monnaies et les devises post-bitcoin qui intéressent chercheurs et artistes un peu partout sur Internet. Des systèmes d’échange locaux (devises locales par exemple), jusqu’au financement participatif en passant par les crypto-monnaies (bitcoin et consorts), c’est le statut même de l’argent et sa place dans les échanges qui est tourneboulé par le numérique.
Au-delà des postures critiques et des interventions artistiques autour de la monnaie que MCD présente en nombre (on citera par exemple l’activisme antifiscal en Espagne de l’artiste Núria Güell qui multiplie les manuels de désobéissance bancaire, les banques du temps en Grèce en pleine crise de la dette ou encore, en France, les expérimentations d’auto-suffisance alimentaire sur la ZAD de Notre-Dame-des-Landes), le mécanisme de la monnaie à l’ère des transactions dématérialisées est abordé d’un point de vue critique et théorique, non pas pour les économistes (atterrés ou pas) mais pour chacun d’entre nous.
Et c’est Geert Lovink, à l’origine du MoneyLab aux Pays-Bas, intitiative pour un dialogue interdisciplinaire entre « artistes, activistes, chercheurs, geeks » qui l’écrit : « S’il vous plaît, participez aux débats (…), ne laissez pas les geeks tous seuls » pour « lutter contre le modèle néo-libéral de l’entrepreneur ».
Lancement MCD#76 – Changer l’argent, le mardi 20 janvier à 19h19, plateau média de la Gaîté lyrique, entrée libre.
MCD#76 Changer l’argent (We Grow Money, We Eat Money, We Shit Money), décembre 2014-février 2015, 9 euros.