Andrea Erdos, la maker girl qui initie les femmes à la bidouille
Publié le 26 octobre 2015 par la rédaction
Australienne et ingénieure, Andrea Erdos a cherché en vain à son arrivée en France des ateliers d’initiation au prototypage réservés aux femmes. Elle a décidé de créer Maker Girls, qui offre des sessions au Carrefour Numérique de la Cité des Sciences.
La démarche d’Andrea Erdos viendrait-elle des rêves non exaucés de la petite fille australienne qu’elle était ? Dans les années 1980, bien avant qu’on parle de mouvement maker, l’Australie proposait déjà des kits électroniques qui fascinaient Andrea… qui en toute logique a décroché son diplôme d’ingénieure en génie électrique à l’université de Nouvelle-Galles du Sud, à Sydney en 2009. Seules 10% de femmes poursuivent cette filière. En Australie aussi, « culturellement et socialement, affirme Andrea, la technologie, c’est le domaine des hommes ». Elle s’impose néanmoins comme tutrice pour superviser les travaux dirigés des étudiants.
En 2006, un programme d’échange lui fait découvrir la France. En 2010, elle vient s’y installer pour travailler et cherche alors des groupes qui lui ressemblent, féminins et anglophones. Tandis qu’aux Etats-Unis, il est facile de trouver des groupes de femmes autour de la technologie, en France, la mixité est la norme. « Si c’est une bonne chose d’un côté, cela ne règle pas les stéréotypes implicites, explique Andrea. Les femmes sont soumises à une pression invisible et ont parfois peur d’être dévalorisées en posant des questions. »
Porte close dans les universités françaises
Forte de soutiens australiens, Andrea tente d’adapter auprès des universités françaises Robogals, un format qui réunit des femmes autour de la robotique. Sans succès. Elle rejoint les groupes féminins existants, Pyladies (pour programmeuses en Python) et Duchess (pour codeuses en langage Java). Elle a également coorganisé fin septembre dans les locaux de Mozilla (l’éditeur de Firefox) le CoFestival, qui ouvre sans discrimination les savoir-faire scientifiques et technologiques.
«Affirmative action» plutôt que «discrimination positive»
Puisqu’il n’y a pas grand chose pour les makers au féminin, Andrea franchit la porte des labs qui travaillent sur des sujets qui la touchent, comme Data Paulette. Mais c’est sa visite à l’Open Hardware Summit de Rome en septembre 2014 qui va être décisive. De nombreuses femmes comptent parmi les intervenants de la Maker Faire attenante et elle se rend compte que « le mouvement maker est une occasion unique pour investir les femmes dans la technologie ». Elle participe dans la foulée à un Adacamp, un week-end sur le thème du féminisme et de l’open source.
Andrea fait sienne l’idée d’une discrimination positive en faveur des femmes vis à vis de la technologie, mais préfère parler « d’affirmative action, parce que c’est plus positif ». Elle pioche des idées chez Adafruit dont elle traduit un certain nombre de tutoriels et décide de créer le groupe Maker Girls : « J’ai acheté le nom de domaine Maker Girls mais je me suis aperçue que les Français utilisaient beaucoup Meetup qui intégrait tout ce dont j’avais besoin ».
«Il ne s’agit pas d’exclure les hommes mais d’inclure les femmes»
Le groupe Maker Girls était né, qui invite les femmes à des ateliers d’initiation à l’électronique, des Arduinos notamment. Andrea cherche à susciter « une autre dynamique » sans pour autant exclure les hommes, qui peuvent venir s’ils sont accompagnés d’une femme.
Un homme justement, Matthieu Vernet, chargé de projet au Carrefour Numérique de la Cité des Sciences à Paris, cherchait à faire venir davantage de femmes à la fabrication numérique. Il propose à Andrea de tenir le premier meetup Maker Girls à la Cité en mars 2015. Deux autres suivront, toujours gratuits.
Andrea met au programme de Maker Girls des outils qui lient la technologie et l’artisanat, comme les kits Lilypad pour le textile ou le papier connecté, « pour toucher des gens qui ne sont pas du milieu maker ». Le groupe crée des affinités autour, par exemple, d’un projet d’arrosage automatique, d’un bracelet vibrant pour personnes mal-entendantes ou encore d’un dispositif pour mesurer la température du chocolat.
«Une des participantes me disait préférer l’idée de parité mais a fini par me confier qu’avec une majorité de femmes, elle s’était sentie plus libérée.»
L’expérience Maker Girls se poursuit au Carrefour Numérique de la Cité des Sciences dès le 7 novembre prochain, un nouveau rendez-vous qu’Andrea ambitionne de rendre mensuel. En attendant, elle a rendu visite à Makery pour le Bricole it spécial AdaWeek, cette semaine consacrée à la place des femmes dans la science et les technologies.
Le prochain meetup Maker Girls