Makery

Le SenseCube prototype les start-ups solidaires

Des tables de ping-pong en guise de bureaux : on est bien chez des start-upers. © Nicolas Barrial

L’innovation peut aussi rimer avec social et solidaire. Makery a rendu visite au SenseCube à Paris, l’un des rares incubateurs spécialisés dans les projets de start-ups à vocation solidaire.

Faire du biogaz avec les restes de cantines (Love Your Waste), emprunter des stagiaires aux entreprises pour les faire travailler dans des programmes sociaux (Stagiaires sans frontière), créer un marché de meubles design fabriqués par des personnes en fragilité sociale (UpCycly). Ces projets sont incubés au SenseCube, « accélérateur de start-ups sociales utilisant le levier des nouvelles technologies pour résoudre des enjeux sociaux ou environnementaux ».

Alors que depuis quelques années fleurissent les départements Responsabilité sociale d’entreprise (RSE), de nouvelles pousses choisissent précisément la solidarité et le vivre-ensemble comme cœur de métier. On les retrouve au sein des quelques incubateurs de l’économie sociale et solidaire comme Antropia à l’école de l’Essec, Ronalpia à Lyon, Alter’Incub dans le Sud-Est ou encore le Social Good Lab de la Ville de Paris.

Maï-Lien, co-manager de SenseCube à Bastille, incubateur de start-ups sociales. © Nicolas Barrial

A Paris, le SenseCube, ouvert en 2014, est en passe d’achever sa deuxième session d’incubation pour 7 start-ups, chacune hébergée 6 mois à Bastille. Maï-Lien Nguyen Duy, co-manager de l’incubateur, explique que le critère de choix des candidats, c’est le « petit grain de folie » de projets qui doivent inclure un impact social ou solidaire dans leur cahier des charges et présenter un modèle économique qui tienne la route. 

Start-ups rebelles avec une cause

Mais au contraire d’une entreprise classique, ici, « le but est la solidarité et l’offre commerciale est le moyen de l’atteindre », affirme Wassim Chelfy, fondateur d’Upcycly. « Le monde a de gros problèmes et personne ne va les régler à notre place, poursuit-il. Pourtant, on dispose désormais d’outils inégalés, cette époque est charnière. » Ces outils peuvent être des applications comme I Wheel Share, futur réseau social de l’accessibilité des lieux aux personnes handicapées, qui a lancé son appel à financement sur Ulule, ou encore MyFuture, qui aide les lycéens à choisir leur orientation.

Yes Wheel Can !, l’art du slogan au service du handicap. © Nicolas Barrial

Pour ce qui concerne Upcycly, l’outil n’est pas informatique mais plutôt tangible, puisqu’il s’agit de palettes et de pneus usagés, matiné de Fullmobs pour la mobilisation. En invitant monsieur Tout-le-monde à fabriquer du mobilier éco-responsable à partir de récup’, ce disciple de Navi Radjou, porteur du concept d’innovation frugale, veut éviter que « le mouvement maker ne devienne un nouvel entre-soi ». 

Le modèle économique est peut-être là, dans ce que l’on peut transposer de l’initiative citoyenne à l’entreprise. UpCycly compte former des salariés à bâtir leurs espaces sociaux ensemble. La jeune start-up a déjà mis en réseau des installations aquaponiques sur le modèle de La ruche qui dit oui, histoire de créer du lien. Ce n’est peut-être pas un hasard quand on sait que Guilhem Cheron, co-fondateur de la Ruche, compte parmi les mentors du SenseCube…

Les créations éco-responsables d’Upcycly meublent les espaces du SenseCube. © Nicolas Barrial

Tiers-lieu solidaire et community building

La vraie plus-value de SenseCube, c’est sa communauté internationale de bénévoles qui servent d’early adopters. Cette montée en puissance par la communauté a été développée par Christian Vanizette, co-fondateur de MakeSense, qui héberge l’incubateur et qui a mobilisé, depuis trois ans, plus de 15.000 personnes pour aider des entrepreneurs sociaux à travers le monde.

Entre eux, les participants trouvent également des synergies : Upcycly devait construire une rampe de chargement pour Love your Waste, start-up qui propose de transformer en biométhane les déchets que les cantines doivent retraiter sous peine d’amendes. 

Tanguy Desandre Navarre et Juliette Franquet de Love Your Waste. © Nicolas Barrial

Des modèles urbi et orbi

Tous les incubés n’ont pas la « chance » d’avoir accès à un tel marché. Maï-Lien Nguyen Duy insiste sur la volonté du SenseCube de favoriser des modèles transposables. Comme c’est le cas pour Ma ville je t’aide, elle aussi incubée par SenseCube, qui fédère les désirs d’initiatives citoyennes et a créé un marque blanche pour Paris, Paris je t’aide ! 

C’est en tout cas une ligne que les incubés de la session précédente semblent avoir suivie : Activ’Action, qui valorise le potentiel des chômeurs, propose ses activités à Paris, Strasbourg et Singapour. L’Alternative urbaine propose des visites de ville guidées par des mal-logés.

Grâce au SenseCube, de jeunes pousses sociales expérimentent des méthodes issues de l’univers des start-ups : prototypage de l’offre, crowdfunding… En cas de réussite, une partie revient au SenseCube. Ce n’est pas la seule façon dont l’incubateur se finance. Il loue également un espace de co-working à des entreprises, ce qui permet d’héberger gratuitement les jeunes pousses. 

Au rez-de-chaussée, MakeSense et le SenseCube. A l’étage, l’espace co-working. © Nicolas Barrial

Alors que la deuxième session s’achève dans moins d’un mois, l’incubateur lance un appel pour la prochaine.

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