En travaux, le centre commercial de Bron s’ouvre à l’Open Lab
Publié le 29 mai 2015 par Ewen Chardronnet
Le Lyon Bron Open Lab occupe depuis un an une boutique des Galeries Lafayette en réfection et aide à penser la ville avec ses habitants. Et participe ce week-end au Park n’Fest, sur le parking du centre commercial.
Bron, envoyée spéciale
Samedi après-midi sur le parking des Galeries Lafayette à Bron, en banlieue lyonnaise. On s’active. Dans une semaine, ce samedi 30 mai, jour de la fête des voisins, a lieu le Park n’Fest, héritier direct des Parking Days américains. Ce festival de co-création de quartier, auquel va largement contribuer le Lyon Bron Open Lab, propose performances et expositions, initiation à la danse dynamique, au foot-fauteuil ou à la capoeira, atelier tricot ou agriculture urbaine. En attendant, on scie, on coupe et on peint pour construire bancs, jardinières et présentoirs qui feront de ce parking de centre commercial un lieu festif et convivial le jour J.
Nous sommes à Bron. De l’autre côté de la rue, Lyon. Surplombant cette frontière aussi symbolique qu’administrative, les Galeries Lafayette, bâtiment du genre mastoc construit dans les années 1960 et laissé tel quel depuis. Une ode à la voiture et au béton qui entre en travaux pour un ravalement de façade bien mérité.
Il était temps certes, mais les travaux pourraient durer plusieurs années et ne passeront sûrement pas inaperçus pour les clients et les habitants du quartier. « La question qui s’est posée est : comment faire pour que ce chantier soit autre chose qu’une nuisance ? », nous explique Adam Roigart, chargé de projet pour l’Open Lab.
Urbanisme tactique ou la ville version DIY
C’est le genre de question qu’il se pose souvent. Adam travaille pour Creative Roots, un collectif international de création urbaine basé à Copenhague qui s’inscrit dans la veine de l’urbanisme tactique. L’expérimentation et la collaboration avec les populations locales sont au cœur de cet urbanisme DiY.
Selon Anaïs Lora, fondatrice de Creative Roots, en charge du Lyon Bron Open Lab, «notre devise c’est “se rencontrer et créer”. Tout ce côté prototypage, c’est ça la méthode : on teste sur le terrain par le faire et ce sont les gens qui décident si ça marche ou non.»
C’est ainsi que Citynove, l’agence immobilière propriétaire des bâtiments de Galeries Lafayette, leur a confié le projet et a prêté le local d’un ancien coiffeur pour installer leur laboratoire éphémère.
« Le fil rouge, c’est de mettre en avant les gens qui font le quartier », explique Anaïs. Comment ? En organisant par exemple des explorations urbaines. Une balade thématique avec des architectes ou des paysagistes, où l’on observe la ville sous un autre angle –celui de la biodiversité, de l’accessibilité ou de l’agriculture urbaine. Ou encore des expos temporaires comme celle des 1001 sourires, leur plus grand projet jusqu’ici. Une œuvre à la JR où chaque habitant et usager se fait tirer le portrait et formule un vœu. « Liberté, Paix, Diversité ».
Défi relevé : les 1001 sourires ont été récoltés, puis placardés sur la friche qui camoufle le chantier. Le reste du temps, Lyon Bron Open Lab assure l’intendance. Chaque semaine, les Apéros Actions, des discussions autour des problématiques de la ville, réunissent une dizaine de personnes. Les membres du Lab construisent du mobilier pour ce qu’ils appellent « l’esplanade » (en fait une petite place entre le parking et le chantier Total) ou font du jardinage urbain. « On voulait vraiment que ce soit un lieu d’accueil. Pas seulement faire de l’évènementiel, mais en faire un lieu de quotidien », explique Adam.
Le projet des « 1001 Sourires » :
Le contre-exemple de la Samaritaine
Et les Galeries Lafayette dans tout ça ? Si Lyon Bron Open Lab est une association et ne rapporte donc pas un sou, le centre commercial et l’agence foncière Citynove y trouvent leur compte, nous assure Eric Costa, président de Citynove. « En amont des chantiers, pour les opérations immobilières, il y a toujours une phase de concertation vraiment cruciale. Selon qu’elle soit réussie ou non, un projet obtient ses autorisations administratives, peut être reporté pendant des années ou bien ne jamais voir le jour », détaille Eric Costa.
Pour éviter à ses Galeries le même sort que la Samaritaine parisienne, dont les travaux vont de suspension en supension, mieux vaut écouter la population locale. Cette opération low-cost (« à peine une centaine de milliers d’euros ») est un plein succès pour eux : le contrat de l’association a été renouvelé jusqu’à décembre, « au moins ».
Et il faut croire que l’agence foncière s’est prise au jeu de l’urbanisme façon maker. « Ça nous intéresse d’expérimenter, se réjouit Eric Costa. En réalité, quand nous nous sommes embarqués dans le projet, nous n’avions pas d’idée précise de ce que ça aller donner, de comment ça allait être reçu. C’est un laboratoire, une forme d’expérimentation. On apprend au fur et à mesure.»
Côté voisinage aussi, l’expérience semble réussie. Frank Deets, un Américain installé depuis deux ans du côté lyonnais de la rue, passe régulièrement prendre le café, jouer de la contrebasse dans les évènements ou aider « quand [il] peut » : « Ça a apporté de l’animation dans le quartier et ça a amélioré l’attitude dans le voisinage. Ils ont apporté beaucoup d’énergie positive. »