Des oiseaux en origami qui dansent en chœur, est-ce du papier animé, de la bidouille créative ou de l’art traditionnel japonais revisité? Makery a cherché à en savoir plus sur le collectif Ugoita («Ça a bougé», littéralement), auteur de la vidéo virale «Dancing Paper».
Tokyo, de notre correspondante
Leur vidéo est devenue virale en un clin d’œil. Le ballet de grues en papier doré dansant en rythme grâce à de minuscules aimants animés par des courants électriques, posté le 28 février sur Youtube, a été vu par près d’un million d’internautes. D’après les makers cachés derrière Dancing Paper, pur moment de japonisme ludique, tout l’intérêt du projet se résume à une exclamation d’émerveillement : « 動いた!» (ugoita : ça a bougé !) D’où le nom de ce collectif candide.
« Dancing Paper », collectif Ugoita, 2015 :
« Comme nous n’avions aucune expérience des outils numériques, c’était un grand moment de joie à chaque fois qu’on voyait enfin l’objet bouger, explique Mashima, porte-parole de l’équipe. A ce moment-là, on ne pouvait s’empêcher de crier tous en même temps : Ugoita !! »
N’empêche, le collectif a aussi une autre explication, non moins noble, pour son appellation insolite. « Le but du collectif, c’est de créer des œuvres qui bougent, affirme Mashima. Justement parce que beaucoup d’entre nous sommes issus des beaux-arts où les œuvres ne bougent pas (sculpture, peinture, etc.). »
Depuis 2012 donc, Ugoita réunit sept individus, tous salarymen dans une même entreprise de design à Osaka, qui passent leur week-ends dans un atelier loué collectivement à bricoler ensemble des objets mouvants. C’est là où ces programmeurs amateurs, designers de formation et autres talents partagent leurs compétences pour créer tout simplement ce qui leur plaît. Parmi leurs outils de service, on retrouve les incontournables imprimante 3D et Arduino, mais aussi un micro ordinateur AVR et Atmel Studio.
Mais revenons à nos grues dansantes. Dancing Paper a été créé pour l’exposition HYBRID à Shanghai fin 2014. « Comme il s’agissait en plus d’une expo à l’étranger, j’ai pensé à l’origami, emblème de la culture japonaise, dit Mashima. Lorsque j’ai rajouté les aimants, cela devenait encore plus drôle que je ne l’avais imaginé. Nous avons donc passé quatre mois à peaufiner le projet pour une expo d’un mois en Chine. »… et au moins 15 minutes de gloire lorsque la vidéo est devenue virale.
Cependant, Ugoita avait déjà attiré l’attention des internautes avec ses vidéos de détournements ludiques, notamment celles dont la star est le rétro-fétiche Nintendo (NES) et ses accessoires obsolètes : le très charmant 8bit Harmonica transforme une vieille cartouche en véritable instrument de musique chiptunes, tandis que le making of de Moving Nintendo est mis en scène comme un drame dont le climax est la console, télécommandée par le contrôleur, qui bouge.
«8bit Harmonica», Ugoita, 2014:
«Moving NINTENDO», Ugoita, 2014:
A côté de ces œuvres «pour rire», Ugoita a également réalisé quelques pièces poétiques, dont une lampe qui absorbe la couleur de l’objet placé sous lui et un parapluie qui s’allume de LEDs et joue six notes de musique différentes selon l’emplacement des gouttes de pluie, grâce à six capteurs piézoélectriques (pièce primée dans un concours d’ingénierie électronique).
«Musical Rain», Ugoita, 2012:
En attendant la suite des surprises qui bougent, Mashima reste lucide (et relativement modeste) sur la vision d’Ugoita : « Créer ce qui nous amuse, et le diffuser à travers le monde. »