Robochop est une expérience présentée jusqu’au 20 mars au salon CeBit de Hanovre sur les nouvelles tendances de l’Internet industriel. Au moyen d’une interface en ligne, les particuliers peuvent expérimenter à distance la fabrication d’objets avec des robots d’usine.
Robochop, conçu par les designers allemands Reed Kram et Clemens Weisshaar, met en œuvre quatre bras robots KUKA KR60, reconnus pour leur précision et leur vélocité. Internautes et visiteurs du salon CeBit qui s’ouvre aujourd’hui, peuvent accéder à une interface permettant de piloter des découpes dans 2000 cubes en polystyrène (durable selon les concepteurs) de 40 cm de côté. Le résultat sera livré dans la foulée du salon à ceux dont le design aura été sélectionné.
Présentation du projet Robochop :
« Vous n’avez plus assez de carburant robot »
Nous avons pris en main l’interface. Elle est très simple, voire minimaliste ; une grille de guidage n’aurait pas été de trop pour éviter de faire la symétrie au jugé. Reste le challenge d’être sélectionné pour une découpe sur le salon… depuis son salon !
Cliquez sur « Chop » pour faire les découpes une par une. Vous pouvez au choix procéder de point à point ou tirer les lignes. Partez toujours de l’extérieur du cube et ne croisez pas les lignes. Un outil de tracé libre est également à la disposition des plus audacieux. Mais attention, les réalités économiques peuvent vous rattraper : un message « Vous n’avez plus de carburant robot » indique quand vous avez abusé de votre temps-usine.
S’il s’agit d’intégrer des éléments ludiques à vertu pédagogique pour le grand public, les designers ont surtout pour but de promouvoir la démarche auprès de l’industrie. Le CeBit reste un salon à caractère professionnel et l’exposition Code_n qui accueille Robochop propose d’ailleurs d’explorer les nouveaux modèles économiques autour du numérique.
Du jeu à la fabrication
Les designers Clemens Weisshaar et Reed Kram qui travaillent pour l’industrie automobile (Audi, Volkswagen), l’art (MoMA) et la mode (Prada) n’en sont pas à leur coup d’essai en ce qui concerne la mise en relation du public avec le monde de l’usine. Ils avaient déjà commis OUTRACE, une installation interactive installée sur Trafalgar Square à Londres en 2010, qui permettait de dessiner des messages lumineux avec bras robots de chez Audi. « Avec Robochop, nous allons vers une nouvelle étape qui consiste à permettre aux utilisateurs de fabriquer et posséder de vrais objets plutôt que de jouer avec le seul média », affirment les concepteurs.
Pour Clemens Weisshaar, la conception de plugins entre le Web et les infrastructures de fabrication de l’industrie est imminente. « C’est faisable, c’est juste une question d’initiative pour faire ce que nous avons fait ici : écrire le code, tester, améliorer. La grande question est de qui viendra l’initiative. »
Je me suis amusé à leur demander s’ils avaient déjà imaginé un nom pour qualifier ces nouveaux process d’accès à l’outillage industriel : « Robfab » serait une option selon Clemens, confirmant cependant qu’on peut aussi parler d’automation linéaire. La logique Robochop peut s’appliquer à toutes les machines même si le robot reste « le cheval le plus sexy de l’écurie industrielle ».
Rendre les machines smart
Pour Clemens − visiblement très enclin à promouvoir le made@Germany − l’Allemagne et son industrie sont bien placées pour être en pointe dans le domaine du Robfab. Il estime ainsi qu’il y a un changement de paradigme qui doit s’opérer dès aujourd’hui au coeur du moteur économique du Mittelstand (l’équivalent allemand du secteur des PME). « La question n’est plus de savoir si l’Internet industriel est une réalité : si les Allemands veulent continuer à fabriquer les meilleurs machines du monde, il faudra les rendre smart. »
Toujours selon le designer, les grosses industries vivent déjà l’Internet industriel – et c’est aussi le cas des consommateurs au travers de la demande. « Lorsque vous pressez le bouton “commandez”, vous enclenchez un nombre incalculable de processus d’achats, de logistiques, de fabrications. » Avec Robochop, les choses sont simplifiées, mais elles permettent aussi de dépasser la simple personnalisation d’un produit pour aller vers la fabrication sur mesure d’une pièce entièrement imaginée par l’utilisateur : « L’écho dans l’industrie sera celui d’une force disruptive. Certains vont l’accueillir avec intérêt et d’autres vont trouver cela effrayant », prédit Clemens.