Avec «Fablabs, etc», Camille Bosqué, Laurent Ricard et Ophélia Noor publient le livre le plus complet à ce jour sur les espaces de fabrication numérique. Truffé d’interviews d’experts et de points précis sur le droit, l’économie ou les perspectives du mouvement maker, l’ouvrage, très au fait de la situation française, se feuillette comme un magazine. En exclusivité, Makery a extrait pour vous les meilleures feuilles et quelques photos.
Tous les textes et images ci-dessous sont tirés de Fablabs, etc., Les nouveaux lieux de fabrication numérique, les photos sont d’Ophélia Noor, le dessin est de Camille Bosqué.
Chapitre 2. Les FabLabs, d’hier à demain
Les premiers FabLabs
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Donner à chacun le pouvoir de créer
« Explorer les implications et les applications de la fabrication personnelle pour toutes ces parties de la planète qui n’ont pas accès au MIT. » C’est ainsi que Neil Gershenfeld explique le passage entre l’expérimentation pédagogique de son cours et l’implantation des premiers FabLabs, pionniers d’une série de lieux dont l’évolution telle qu’on la connaît aujourd’hui n’avait été en rien anticipée. L’équipe du MIT se plaît d’ailleurs à déclarer à chaque occasion que le développement des FabLabs dans le monde à cette vitesse est « un accident ».
Comment cet imprévu, ce déploiement massif de lieux de fabrication personnelle a-t-il vu le jour ? Quelles ont été les étapes ? À quoi ressemblaient alors les premiers FabLabs ?
Il est probable que rien de tout cela ne serait sorti des laboratoires du MIT si la NSF (National Science Foundation) n’avait accordé au Center for Bits and Atoms un soutien financier en demandant pour contrepartie une valorisation des recherches menées à l’université sur des terrains plus ordinaires – pour effectivement équiper des gens avec les machines testées dans la prestigieuse université. C’est ainsi que dès 2002, la toute première vague de pollinisation fit pousser des FabLabs en Inde, au Costa Rica, au nord de la Norvège, dans la ville de Boston et au Ghana, pour un budget de 20.000 dollars en moyenne par FabLab. Ces derniers ne sont pas alors destinés à être autonomes économiquement, mais entièrement soutenus par le MIT et installés par des équipes constituées aussi bien d’étudiants que de chercheurs. Un constat avait déterminé le lancement de ces missions dans des pays plus ou moins développés : la « fracture numérique » entre les pays n’est pas seulement celle de l’accès aux ordinateurs ; elle se joue aussi sur le long terme. Le projet partait initialement du constat qu’envoyer des ordinateurs aux quatre coins du monde ne constitue pas une solution, et qu’il apparaît plus intéressant d’expédier de quoi les fabriquer, dans la mesure des réalités et des besoins locaux. En filigrane, les chercheurs du MIT, organisés autour de Neil Gershenfeld, défendaient un discours progressiste : « Au lieu de construire de meilleures bombes, les technologies émergentes peuvent servir à construire de meilleures communautés. »
Pour développer ce projet aux quatre coins de la planète, une « charte des FabLabs » a été vite établie. Posant un certain nombre d’orientations à respecter pour pouvoir se revendiquer du mouvement, elle doit être affichée dans tous les ateliers qui s’en réclament.
Des solutions techniques à des problèmes locaux
L’articulation entre les intentions du groupe d’ingénieurs du MIT et les premières incarnations de ces lieux au sein de communautés locales a eu lieu grâce à certains community leaders, des personnes déjà fortement impliquées dans la vie de leur quartier ou région sur lesquels le développement des FabLabs a pu s’appuyer. C’est après avoir observé une « combinaison de besoins et d’opportunités qui les conduit à devenir des protagonistes des technologies plutôt que des spectateurs » que certains piliers des premiers pas du mouvement sont identifiés, puis peu à peu associés à la démarche.
À l’heure actuelle, leurs noms ne sont familiers que de ceux qui connaissent l’histoire première des FabLabs. Force est de constater que les mutations récentes ont tendance à faire oublier peu à peu ces figures fondatrices. Ainsi, alors que le cours de Neil Gershenfeld est resté célèbre, le South End Technology Center de Boston n’est pas présent dans les mémoires. Il est pourtant le premier vrai FabLab américain. L’histoire des FabLabs, comme tout récit, se déforme en circulant et se transforme pour mettre en valeur tel ou tel aspect des choses, en oubliant parfois quelques racines qui au-delà des technologies valorisent des actions humaines très humbles mais essentielles.
Le tout premier FabLab au monde a été installé au début des années 2000, en Inde, au Vigyan Ashram. C’est alors une école rurale perdue dans l’Inde de l’Ouest, située au milieu d’un petit village appelé Pabal à quelques centaines de kilomètres de Bombay. Là, sous la houlette de Kalbag, un ancien professeur en technologies de l’alimentation, des groupes de jeunes suivent une formation scientifique appliquée directement aux conditions d’existence de leur région, à savoir un environnement aride, pauvre et avec un accès à l’eau extrêmement réduit. Basée sur les principes de l’apprentissage par la pratique, l’école a elle-même été construite avec les étudiants, d’anciens enfants qui avaient abandonné les études du circuit classique. Vigyan Ashram est une école payante qui est devenue peu à peu autonome grâce aux fonds complémentaires récoltés par de petites entreprises développées autour de l’école : mesures, localisation de l’eau, construction de tracteurs à partir de carcasses de Jeeps (le MechBull). Pabal est alors depuis plusieurs années, par la force de Kalbag et de la petite communauté qu’il a soudée autour de ses projets, une ville étonnamment innovante.
C’est à la suite d’une visite des chercheurs que le lien entre certaines activités déjà mises en place avec les moyens du bord par l’équipe de l’école et les outils développés au MIT est apparu : « Quand j’ai rencontré Kalbag pour la première fois, j’ai évoqué en passant le genre d’outils de fabrication personnelle que nous développions et utilisions au MIT. Il a déroulé immédiatement une longue liste des choses qu’ils aimeraient pouvoir mesurer ici, mais pour lesquelles les moyens manquaient », se souvient Neil Gershenfeld. Il s’agit alors principalement de préoccupations liées à l’agriculture, plus dans une logique de survie que de profit. Dans un contexte rural aride et frugal, le besoin de connaître et capter certaines données de l’environnement est crucial. Il garantit à long terme une forme d’indépendance énergétique autant qu’un développement quotidien de l’instrumentation nécessaire à la gestion de l’eau, du lait, du riz, des œufs et autres produits de première nécessité.
« Parce que Kalbag et ses étudiants avaient à produire leur nourriture en même temps que la technologie qu’ils employaient, l’impact de l’accès aux outils pour développer leurs machines était bien plus immédiat pour eux que pour n’importe quel ingénieur », explique Neil Gershenfeld. « La demande récurrente d’outils d’analyse et de mesure pour les milieux ruraux a conduit à la décision toute simple de créer un FabLab avec Kalbag à Vigyan Ashram, pour permettre de développer et produire des solutions à ces problèmes locaux. L’opportunité à Pabal était évidente ; ce qui l’était moins, c’était l’impact du Lab au-delà de cette région. »
C’est suite à une discussion entre l’équipe du MIT et celle de Kalbag, à propos de la constitution des réseaux électriques indiens et les pertes d’énergie dues aux vols et aux détournements d’électricité dans la région, que le FabLab de Kalbag devint le terrain d’expériences d’ingénieurs venus de Delhi pour prototyper des outils de mesure du réseau électrique local. Quelques mois plus tard, la situation s’inverse : de retour aux États-Unis, Neil Gershenfeld visite le laboratoire de développement d’ingénierie d’une grande société travaillant sur la base de recherches effectuées au MIT. Il fait face à la grande inertie de l’infrastructure de cette entreprise en ce qui concerne les tests et les essais des produits qui doivent passer entre les mains de pléthoriques équipes d’ingénieurs. Neil Gershenfeld propose alors de contourner les protocoles en allant directement tester ces idées, en s’installant au FabLab de Kalbag, à Pabal. « Quand j’ai dit en plaisantant qu’on pourrait aller tester cela à la ferme de Kalbag, le silence dans la pièce m’a fait penser que la blague était prise très au sérieux. »
Un engagement social
Après le FabLab de Pabal qui marquait la collaboration entre Kalbag et les ingénieurs du MIT, le FabLab de Boston au South End Technology Center ouvre ses portes en 2003. Il s’appuie sur une autre personnalité déjà active au sein de sa communauté, mais pour des raisons bien différentes : Mel King. « Growing inventors » est le titre du chapitre de FAB (2007) dans lequel Neil Gershenfeld présente ces piliers de communauté sur lesquels les premiers FabLabs se sont appuyés. Ce sont des personnes exceptionnelles par leur engagement pour des causes locales au service de populations isolées ou marginalisées. Mel King est l’un d’eux. C’est un homme déjà âgé quand son destin croise celui des FabLabs. Il est connu pour avoir conduit le mouvement Tent City en 1968 dans un quartier pauvre de la ville pour protester contre des plans d’urbanisme qui prévoyaient d’installer un gigantesque parking au lieu d’habitations. Convaincu que les citoyens de la ville pouvaient, en manifestant, influer sur cette décision, il avait grandement contribué à la mobilisation des habitants du quartier. Il les a incités à occuper le terrain, en dressant plusieurs centaines de tentes dans la zone convoitée. Suite à cet épisode qui a mené à la construction de logements sociaux appelés Tent City en hommage à la manifestation qui leur fit voir le jour, Mel King a été l’initiateur du South End Technology Center. C’est un community center ouvert nuit et jour et qui propose maintenant depuis une trentaine d’années des formations aux technologies numériques.
À l’occasion de sa retraite vers la fin des années 1970, cet ancien professeur du MIT a investi tout son temps pour aménager et encadrer ce lieu, au départ essentiellement équipé d’ordinateurs. Nous avons pu le rencontrer en avril 2014, au South End Technology Center. Mel King a maintenant quatre-vingt-dix ans. Il est toujours vêtu d’une salopette et porte autour du cou un cordon auquel est accrochée sa clé USB. Quand on l’interroge sur les FabLabs et l’engouement international pour ce mouvement, il prend la question à revers : « La technologie n’est pas une solution pour tout. Je crois en la technologie du cœur. Ce qui compte le plus c’est ce que les gens peuvent avoir à se donner, à partager, à apprendre les uns des autres. »
Quand Mel King a pris sa retraite, il a fait un choix radical qui a permis le développement du community center. Au lieu d’accepter d’avoir un bureau réservé au MIT pour poursuivre ses recherches, ce qui est un privilège accordé aux chercheurs seniors, Mel King a demandé s’il pouvait avoir son bureau à Tent City et s’il était possible de le partager avec la communauté du quartier. C’est ainsi qu’est né cet espace, peu à peu équipé de machines numériques, et finalement baptisé FabLab après des années d’existence et de lutte pour un accès au savoir et aux technologies. Cette nouvelle appellation tardive est probablement la raison pour laquelle Mel King répond de manière très vague et allusive à nos questions sur le réseau et sur l’histoire des FabLabs, préférant se concentrer sur les valeurs plus fondamentales qui l’ont poussé à maintenir cet endroit ouvert gratuitement à tous.
Conséquence assez marquante : au lieu de la charte des FabLabs, c’est la charte des droits de l’homme qui est affichée dans l’entrée. C’est comme si l’arrivée de machines de fabrication numérique depuis une décennie n’avait finalement pas changé grand-chose à l’ADN du lieu. Le programme Learn to teach, teach to learn court depuis plusieurs années et rassemble des jeunes du quartier autour de projets qui touchent autant à la gestion de tableaux Excel qu’à la pratique de la poésie, de l’utilisation de l’imprimante 3D à la machine à broder numérique, souvent utilisée par les adolescents du coin pour personnaliser leurs sweats à capuche.
De fabuleux laboratoires
L’exemple du FabLab South End Technology Center, tout comme celui du FabLab du Vigyan Ashram, montre à quel point l’histoire du mouvement FabLab, sous ce nom, précède sa naissance officielle. Néanmoins, dès le départ les ambitions sont assez variées et peuvent aller de la résolution de problèmes environnementaux fondamentaux jusqu’au rassemblement communautaire et à la formation au numérique. En 2004, vint ainsi le tour du Ghana au Takoradi Technical Institute, qui attirait dans les premières années beaucoup d’enfants des rues. Il a ensuite ancré ses activités à cheval entre l’enseignement de certains logiciels et le développement de real-world applications, principalement pour l’énergie solaire.
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Chapitre 5 – Un nouveau tiers-lieu
De nouvelles règles du jeu
Hétérotopies ou utopies concrètes ?
Dans son texte sur les hétérotopies, écrit en 1967, Michel Foucault formule plusieurs principes qui peuvent permettre de décrypter les logiques à l’œuvre dans les FabLabs ou les hackerspaces. Il décrit des lieux qui sont « dessinés dans l’institution même de la société, et qui sont des sortes de contre-emplacements, sortes d’utopies effectivement réalisées ». On peut ainsi comprendre que l’émergence de ces espaces que nous cherchons à décrire dans ce livre se définit en miroir ou en contraste avec les modes d’organisation les plus traditionnels. En effet, on y rencontre de nombreuses personnes qui, par leurs parcours ou leurs activités, sont dans des phases de transition ou agissent dans les marges de notre société : retraités, jeunes en free-lance, étudiants, personnes en recherche d’emploi ou en quête de renouveau… Les hétérotopies, selon la description de Michel Foucault, rassemblent « des activités incompatibles ». Les FabLabs et autres tiers-lieux de ce genre sont effectivement des espaces très organiques qui évoluent et s’organisent autour de plusieurs activités hétéroclites : fabrication, électronique, cuisine, impression 3D, hacking, couture, atelier pour le bois, programmation, réunions ou cours, bibliothèque…
Les hétérotopies sont décrites comme s’opérant « une sorte de rupture absolue avec le temps traditionnel ». Certains hackerspaces ou FabLabs ne sont ouverts qu’en soirée ou parfois uniquement la nuit ou le week-end. D’une certaine manière, ils abolissent le temps. Le hackerspace Noisebridge à San Francisco, par exemple, est ouvert 24 heures sur 24 et sept jours sur sept. Nous y avons passé plusieurs journées : on peut y vivre une expérience relativement semblable à deux heures du matin ou au beau milieu de l’après-midi. Les portes restent ouvertes, chacun peut aller et venir à n’importe quel moment pour y mener tous types d’activités, de la programmation à la fabrication en passant par le tirage de photos argentiques ou la pâtisserie. Les hétérotopies « supposent toujours un système d’ouverture et de fermeture qui, à la fois, les isole et les rend pénétrables ». Noisebridge est un cas extrême, mais il fonctionne sur bien des points comme d’autres makerspaces ou FabLabs. Il est exactement basé sur ce principe : on peut y entrer librement à toute heure, mais personne n’est officiellement chargé d’accueillir les nouveaux venus. Si c’est une forme d’ouverture totale, il n’empêche que cela peut être un frein intimidant pour certaines personnes.
Les FabLabs, hackerspaces et makerspaces se revendiquent aussi parfois des TAZ, des zones temporaires d’autonomie, principe décrit en 1997 par l’écrivain politique Hakim Bey comme des zones d’utopies, espaces indéfinissables proches de l’anarchie et de la piraterie, marges de liberté et de contre-culture proches de l’underground. Bien au-delà de la fabrication numérique, les règles classiques de vie commune sont donc rediscutées et retestées dans les limites de ces espaces implantés dans certaines failles de la société classique. Mais ces projets de transformation sociale, par ou autour des technologies numériques, peuvent susciter des actions ou de nouveaux modes d’organisation à même d’influer véritablement sur le cours des choses.
En ce sens, l’expression étrange d’« utopie concrète » théorisée par le philosophe Ernst Bloch peut égale- ment permettre de qualifier ces pratiques. Les « utopies concrètes » relèvent d’un processus ancré dans la texture même du monde en devenir et cherchent à réaliser les tendances particulières dont il est porteur. Les rêves et les espoirs d’une société meilleure peuvent ainsi constituer une force de transformation, les rêves utopiques se trouvant ainsi intégrés dans le mouvement historique réel en constituant une force de changement effectif du monde. Les engagements pour les « biens communs », la décroissance ou l’accès pour tous aux techniques de fabrication mettent en jeu une inventivité technique et une détermination pratique qui vont dans le sens d’une utopie transformatrice.
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Chapitre 8. Animer et organiser ce «Bazar»
FabLab n’est pas une marque
Pas de label, mais une auto-évaluation
Éric Raymond, un fameux hacker américain à qui l’on doit le terme d’open source, a écrit en 1999 un texte, La Cathédrale et le bazar, dans lequel il raconte le développement du logiciel d’exploitation Linux. Il y confronte les méthodes agiles de développement du logiciel open source face aux programmes classiques et compare à un « bazar » la manière dont les développeurs de logiciels open source travaillent, sans hiérarchie, de manière adaptable et flexible, dans un « ordre spontané ». À l’inverse, il assimile à une cathédrale l’organisation hiérarchique qui sous-tend l’élaboration de logiciels propriétaires fermés, ce qui provoque par conséquent des difficultés d’adaptation. Même si le concept de FabLab est né au MIT dans une structure universitaire réputée – certainement elle-même articulée autour des principes classiques de la cathédrale –, il n’existe pas de recette ou de mode d’emploi pour animer un FabLab ou un makerspace qui voudrait se réclamer du réseau. Le principe de développement de ces lieux est d’ailleurs défini de manière assez floue. Sur quels critères juger alors s’ils fonctionnent bien ou pas ?
Le site http://wiki.fablab.is/wiki/Portal:Labs publie à ce jour l’une des listes des FabLabs du monde la plus fréquemment mise à jour. On peut aussi se reporter au site www.fablab.io, plus récent, lequel recense non seulement les lieux, mais aussi leurs équipements et leur personnel. Chaque FabLab doit simplement être parrainé par un autre déjà inscrit pour pouvoir y apparaître.
Le site wiki, préalablement présenté, se distingue néanmoins par un fonctionnement intéressant : toute personne souhaitant enregistrer son espace de fabrication sous la bannière du réseau officiel des FabLabs peut y entrer son nom, sa localisation et quelques autres informations qui sont ajoutées selon des critères précis et font l’objet d’une auto-évaluation. Le système de notation mis en place peut évoluer en même temps que le FabLab et permet à la communauté de l’évaluer selon quatre critères. On peut donc savoir si le FabLab est ouvert au public, à quelle fréquence, gratuitement ou non. Chaque lieu doit indiquer s’il se réfère ou non à la charte officielle des FabLabs, et doit préciser le type de machines utilisées, sachant que le MIT recommande par principe certains outils communs. Le degré d’implication des membres du FabLab dans des projets à diffusion internationale est également un critère à renseigner, lequel révèle l’engagement du lieu à l’échelle du réseau.
Une note de AAAA sera accordée par auto-évaluation à un FabLab qui est ouvert gratuitement au public, se réclame de la charte des FabLabs de manière explicite, possède la totalité des machines préconisées par le programme officiel et prend part de manière active à la vie du réseau international. À l’inverse, un FabLab qui s’attribue de lui-même la note CCCC est un lieu réservé à un certain public – par exemple dans une entreprise ou une école – qui ne se réfère pas à la charte, ne possède pas les machines requises et ne participe en rien à la vie du réseau. Cette évaluation très souple rend cette liste presque paradoxale : n’importe qui pourrait finalement y apparaître sous le nom de FabLab en déclarant ne rien respecter des quatre critères qui définissent le principe même de ces lieux.
Différentes vocations pour des ambitions variées
Il n’existe donc pas un seul modèle de FabLab, loin de là ! Un FabLab noté AAAA est fondamentalement différent d’un autre noté CCCC. Mais pouvons-nous, dans ce cas, encore parler de FabLab ? En théorie, oui. En pratique, en France, le mot recouvre parfois des espaces très informels qui aux États-Unis se retrouveraient plutôt sous la bannière des hackerspaces. Certains FabLabs à l’inverse sont parfois centrés sur une activité très précise. En France par exemple, le FabLab du CERFAV à Vannes-le-Châtel est spécialisé dans les métiers du verre et ne ressemble à aucun autre. Il est d’ailleurs situé dans une école.
Depuis fin 2013, et suite à l’appel à projets lancé par le cabinet de Fleur Pellerin, certains projets à vocation exclusivement économique ont vu le jour, au risque parfois d’oublier les racines historiques du mouvement, à savoir l’inscription dans un réseau mondial de lieux de fabrication numérique, accessibles régulièrement à tous pour y fabriquer presque tout. La commercialisation des objets qui y sont développés, bien que possible, ne doit pas en être a priori le principal objectif. Cela est pourtant bien précisé dans la charte, mais toutes les interprétations sont possibles, d’autant qu’aucun modèle économique n’existe encore pour permettre aux FabLabs de trouver immédiatement les conditions de leur durabilité financière.
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Chapitre 6. Do It Yourself : système D ou plan B ?
L’imprimante 3D
L’arbre qui cache la forêt
« Pour bien travailler dans un FabLab, vous devez avoir accès à divers outils et affiner vos compétences, à la fois en design et en réalisation. Imprimer des objets téléchargés depuis Thingiverse ne suffit pas. Je pense aussi que peu de personnes peuvent gagner leur vie avec une imprimante 3D de nos jours, mais nombreux sont ceux qui le pourraient avec une découpe laser », explique Bart Bakker, une figure active du réseau qui a monté le miniFabLab aux Pays-Bas en 2010.
L’impression 3D n’est qu’une technologie parmi d’autres dans le paysage de la fabrication numérique personnelle. Constitutive d’un arsenal commun avec les machines à découper au laser ou les fraiseuses numériques, elle partage avec ces machines la possibilité de réaliser des objets à partir de dessins ou modélisations produits par ordinateur.
Dans de nombreux FabLabs ou makerspaces, l’imprimante 3D est le premier point de contact avec les logiques de la fabrication numérique. On vient « pour en voir une en vrai », pour imprimer un petit objet afin de tester soi-même la machine. L’idée de pouvoir réaliser presque tout en contournant les contraintes de la fabrication industrielle est séduisante : selon les récits relayés par les médias, on imagine pouvoir bientôt imprimer sa vaisselle, ses outils, sa nourriture. Au-delà de certains fantasmes, l’imprimante 3D est de facto une machine pratique pour incarner la réalité de la conception numérique.
La même scène se répète à chaque fois. L’imprimante est posée sur une table, reliée à l’ordinateur par un câble ombilical enroulé qui se confond avec d’autres fils électriques et composent sa structure, généralement laissée nue. De loin, on entend déjà une scansion mécanique, un son électronique haché, rythmé par la répétition invariable de la même séquence de petits bruits organiques. Au milieu des gargouillis et toussotements de l’appareil, le plateau chauffant est un mince feuillet métallique qui concentre toute l’attention, fine estrade sur laquelle se transfère bientôt l’image qui s’affichait quelques secondes auparavant sur l’écran de l’ordinateur. Le plateau est parcouru en tous sens par une pièce métallique de laquelle coule un fin filament fondu, immédiatement assimilé par les couches antérieures. Il est à peine posé que déjà un autre niveau de l’objet apparaît, dans une éclosion lente, un dévoilement au ralenti de formes non immédiatement reconnaissables. Parfois un petit cadran affiche le temps qu’il reste avant que l’impression de l’objet ne soit achevée. Le regard de tous est happé par les minuscules étages formés par la matière qui s’élève sur la petite scène, au cœur de la machine. L’impression 3D suspend le temps. La démonstration requiert une attention complète, tandis que l’observation du procédé lui-même apporte généralement une satisfaction suffisante.
Facilement transportable, l’imprimante 3D permet de faire la démonstration de son fonctionnement et de présenter très concrètement le passage de l’image plate numérique au volume en plastique. Néanmoins, une fois cette première fascination passée, ceux qui désirent réellement fabriquer eux-mêmes de petits objets doivent se rendre à l’évidence : tout ne peut pas être fait uniquement avec une imprimante 3D à dépôt de filament. La découpeuse laser, qui permet de travailler à plat le bois, le plexiglas ou même le cuir, ouvre des perspectives plus larges. Ces dernières sont bientôt dépassées par celles de la fraiseuse numérique, laquelle permet de sculpter de nombreux matériaux dans presque n’importe quelle forme réalisée à l’ordinateur.
Si elle reste une bonne porte d’entrée à la découverte d’une forme encore nouvelle de fabrication, l’imprimante 3D ne peut manifestement pas à elle seule satisfaire tous les besoins d’un FabLab. Outil emblématique et symbolique des habitués du DIY, il s’agit d’une machine dont le fonctionnement, tel qu’il se présente aux mains des makers à des prix de plus en plus accessibles, est encore souvent imparfait. Les imprimantes 3D en panne, éventrées ou en cours de réglage constituent ainsi une constante pour la plupart des espaces de fabrication numérique que nous avons visités. Néanmoins, une fois dépassée la déception de certains usagers venus uniquement avec l’idée d’imprimer leurs objets, l’imprimante 3D se révèle être un formidable outil pédagogique pour comprendre comment fonctionne ce type de machines, où se retrouve un concentré d’ingénierie en mécanique, électronique, plasturgie et informatique.
Un outil convivial ?
Toutes les imprimantes 3D sont différentes. Le projet RepRap, à l’origine du développement en open source de la complexité de cette technique a été diffusé comme une « boîte à outils technologique » adaptable et modifiable. Cette stratégie a permis le développement d’une variété de modèles. Elles sont auto-réplicantes, car capables d’imprimer elles-mêmes une grande partie des pièces qui les composent. Les imprimantes 3D basées sur le modèle Mendel sont conçues à partir d’un système d’assemblage simple composé de tiges filetées et de profilés d’aluminium. L’amélioration des performances de ces machines est un défi constant pour la communauté de particuliers qui construisent eux-mêmes leurs propres imprimantes.
« On a lu le mode d’emploi, mais on l’a jeté », nous expliquait un jeune hacker du /tmp/lab à Vitry. Les appareils présents dans la plupart des hackerspaces (mais aussi dans certains FabLabs quand ils ne sont pas soumis à de trop fortes normes de sécurité) sont souvent laissés toutes entrailles ouvertes. L’opérateur est ainsi en contact direct avec le corps de la machine, à l’affût du moindre bruit anormal, engagé personnellement dans l’activité technique. On peut aussi y voir un refus de toute forme de surveillance des comportements, qui est décrite comme obstacle à l’accident et aux mouvements libres. Les imprimantes 3D comme la RepRap et ses descendantes présentent donc un dépouillement, une mise à nu qui garantit et provoque la réflexion, l’évolution et le jeu, en accentuant la plasticité de l’appareil, lequel peut devenir lui-même objet d’expérimentation et de test.
« Une société conviviale est une société qui donne à l’homme la possibilité d’exercer l’action la plus auto- nome et la plus créative, à l’aide d’outils moins contrôlables par autrui », écrit Ivan Illich en 1973 dans La convivialité. « L’outil convivial est celui qui me laisse la plus grande latitude et le plus grand pouvoir de modifier le monde au gré de mon intention. L’outil industriel me dénie ce pouvoir ; bien plus, à travers lui, un autre que moi détermine ma demande, rétrécit ma marge de contrôle et régit mon sens. » Allant à contre-courant des utilisateurs qui s’en tiennent aux commandes prévues par les concepteurs et luttant contre l’objet fermé et la boîte noire, les hackers se placent délibérément dans des situations « au bord de la catastrophe », selon l’expression de la sociologue américaine Sherry Turkle. Cette dernière étudie ce mouvement depuis les années 1980. Au-delà des ajustements et des jeux de débrayage qui déterminent une conduite active, certains opérateurs cherchent à explorer délibérément, en mettant en difficulté leurs imprimantes 3D ou en visant des situations d’échec technique non encore explorées, ce qui les amène à pousser plus loin les limites de leur ingéniosité.
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Chapitre 6. Do It Yourself : système D ou plan B ?
Du design en partage
Open design : libérez les objets !
Moyen de résistance ou de résilience, cette pratique du faire soi-même participe à l’apparition de nouveaux rôles pour les designers. Il s’agit de s’appuyer sur des logiques de documentation et de partage pour laisser une plus grande marge de manœuvre aux usagers, lesquels peuvent ainsi concevoir eux-mêmes certains produits. Derrière le mouvement de l’open design se cache la démarche de certains designers qui encouragent la distribution et la documentation des plans d’un objet, afin de favoriser les modifications ou réappropriations. De nouvelles règles de propriété intellectuelle se développent en conséquence. Les licences Creative Commons, en particulier, ont été conçues pour permettre des adaptations variées du système de copyright. Cela donne la possibilité à tout concepteur de conserver les droits sur un objet, tout en autorisant le partage, la modification et la distribution de son travail selon des termes définis par la licence choisie. L’open design implique une forme de cocréation, dans laquelle l’objet final peut être défini par les usagers au lieu d’être imposé par une société extérieure sous la forme d’un objet clos.
Dans l’Open Design Manifesto publié en 2010 par le designer Ronen Kadushin, on peut lire : « Les éditeurs, qui ont le pouvoir de contrôler tous les aspects du produit, sont les geôliers de la créativité, décidant ce qui devrait être offert aux consommateurs et de quelle manière. » Les deux prérequis de l’open design y sont définis. Ils impliquent le partage en Creative Commons, mais aussi la possibilité de fabriquer les objets directement à partir d’un fichier numérique.
Les expérimentations du mouvement open design sont les nœuds d’un nouveau système industriel possible. En se combinant aux FabLabs et autres ateliers partagés, elles peuvent incarner les expé- rimentations « petites, locales, ouvertes et connectées » qu’un autre designer italien, Ezio Manzini, anticipe déjà dans les années 1970. À cette époque, il dresse les contours d’une nouvelle économie durable. L’open design peut permettre de développer une vision critique des normes et pratiques institutionnelles actuelles.
Ce que certains appellent le critical making répond également à une nouvelle compréhension sociale et environnementale des modes d’existence des objets que nous construisons. Les FabLabs garantissent à tous un accès facile à des machines, à la condition de partager ses projets, d’une manière ou d’une autre. Néanmoins, rares sont les personnes qui ont les compétences, le temps ou la réelle envie de concevoir eux-mêmes leurs vêtements, mobilier ou autres objets quotidiens. Ainsi, certaines voix s’élèvent dans les débats autour de l’open design pour exprimer une peur de voir le monde se peupler d’objets laids et mal conçus, parce qu’imaginés et fabriqués par des personnes qui n’ont pas été formées au design. Cette question fait bien entendu écho aux doutes et rejets exprimés dans d’autres disciplines, dès les années 1990, lorsque les blogs ou les sites de journalisme amateur ont commencé à fleurir. Les conflits de légitimité sont encore bien présents. Les avancées de l’open design et de la démocratisation des outils de conception et de fabrication ne donneront-elles naissance qu’à des séries de monstres difformes ?
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Chapitre 6. Do It Yourself : système D ou plan B ?
Une pratique militante
Croiser les savoir-faire
Le DIY et les logiques de réappropriation des savoir-faire et de certains outils techniques ne concernent pas exclusivement les outils numériques. Les ateliers partagés comme les FabLabs rassemblent sous un même toit des machines numériques, mais également des outils plus classiques ou traditionnels. De nombreux exemples de projets prouvent que des croisements sont possibles entre des techniques artisanales et des technologies numériques. Au FabLab d’Amsterdam, la Makers’Guild, lancée en 2013, est une initiative qui va dans ce sens. Ce programme a pour objectif de réintroduire du travail manuel et de l’artisanat aux projets de fabrication numérique du FabLab. La Waag Society, qui héberge le FabLab d’Amsterdam dans l’une des plus anciennes maisons de la ville, a élaboré ce projet avec l’aide d’Alex Schaub, le FabManager. Quand nous avons visité le FabLab d’Amsterdam, Alex Schaub a tenu à nous ouvrir les portes des parties les plus anciennes de ce petit château. Situé en plein cœur d’Amsterdam, à deux pas du quartier rouge, ce monument était au Moyen Âge une maison de guildes. Il est entouré de quatre tourelles, chacune marquée par les emblèmes de ces différents métiers. Le bâtiment, imprégné de cet héritage, accueille depuis 2008 un FabLab de près de 200m2, où se croisent de nombreux designers, architectes, artisans, professionnels ou amateurs.
Alex Schaub se distingue par un parcours intéressant, à l’image du mélange qui caractérise son FabLab. En dehors de ses heures à l’atelier, il joue de la basse et du piano, mais il a également été horloger, chorégraphe et technicien. Il a d’ailleurs lui-même fabriqué sa guitare basse au FabLab, ponçant les courbes de son instrument quand il n’était pas occupé par les dernières retouches à apporter au FabFoos (un babyfoot open source) ou par la fameuse prothèse à 50 dollars, fabriquée en collaboration entre le FabLab de Yogyakarta en Indonésie et celui d’Amsterdam.
Au FabLab Kamakura, au Japon, nous avons retrouvé un discours assez similaire. L’équipe, constituée d’Hiroya Tanaka et de Youka Watanabe, établit des ponts entre les artisans locaux et les machines numé- riques. Ils expérimentent aussi différentes manières de procéder qui combinent des techniques tradi- tionnelles japonaises à des méthodes de conception assistée par ordinateur. En glissant une feuille de cuir dans la découpeuse laser, ils ont ainsi créé une paire de mules baptisées Kuluska slippers, laquelle est devenue un véritable emblème pour le FabLab. Par le biais du designer et FabLab Nomad Jens Dyvik, ces chaussons se sont ensuite exportés au Kenya, où ils ont été adaptés par les habitants de la région. Cet objet, resté célèbre dans la communauté FabLab, a d’ailleurs été exposé au FAB10 à Barcelone pour incarner les réalisations marquantes de l’année. Lors de notre visite, nous avons également pu découvrir une intéressante petite boîte noire couverte de laque. Il s’agit d’un objet qui tient dans la main, ressemble à toutes les autres boîtes de ce type, avec une base hexagonale, un couvercle vissé et des contours très bien définis. « Cet objet a été imprimé en 3D, puis lissé et poncé comme nous le faisons pour nos objets en bois », nous avait expliqué Youka Watanabe. Les artisans spécialisés dans le laqué ont ensuite appliqué couche après couche l’épais vernis, ponçant après chaque passage pour obtenir petit à petit une surface entièrement brillante. « En réalité, cela nous a pris beaucoup plus de temps que pour un objet en bois, mais l’exercice en valait la peine ! » La valeur de démonstration est en effet ce qui compte le plus pour ce petit objet, qui fait la fierté du FabLab Kamakura et qui synthétise en lui-même la rencontre entre une technique extrêmement ancienne et les modes de fabrication les plus contemporains.
Déprogrammer l’obsolescence
L’obsolescence programmée est un terme qui désigne un symptôme du capitalisme, accusé d’augmenter artificiellement la consommation en fabriquant des objets conçus pour cesser de fonctionner au bout d’un certain temps. Ce système économique promeut par conséquent une consommation excessive due à la courte vie des produits. Nous commençons depuis quelques années à ressentir les conséquences de ce modèle, puisqu’il pousse à la surexploitation des ressources naturelles qui tendent à disparaître. On parle alors du peak oil ou « pic pétrolier » pour qualifier le moment où la production de pétrole décline à cause de l’épuisement des réserves – ce qui aurait d’ailleurs été atteint puis dépassé en 2010. L’augmentation de la pollution est également un élément important qui pourrait être réduit par la modification de nos habitudes de consommation. On envisage donc un ralentissement de l’économie dont les conséquences sur les modes de vie contemporains sont encore à évaluer.
Quoi qu’il en soit, en septembre 2014, le projet de loi sur la transition énergétique a accueilli un amendement selon lequel l’obsolescence programmée par les fabricants pourra être punie en tant que tromperie « sur la durée de vie du produit intentionnellement raccourcie lors de sa conception ». Et entraîner une peine de prison de deux ans au plus, ainsi qu’une amende de 300.000 euros. Encore faudra-t-il pouvoir en apporter la preuve…
Différents types d’obsolescences existent. Au-delà de l’obsolescence dite esthétique, qui touche aux formes de certains produits, l’obsolescence indirecte est quant à elle liée à l’impossibilité de réparer un produit faute de pièces détachées adéquates. L’obsolescence d’incompatibilité provient d’un fonctionnement rendu impossible par l’actualisation des systèmes d’exploitation, comme c’est le cas de certains logiciels informatiques. L’obsolescence de fonctionnement qualifie les produits conçus pour marcher un certain nombre de fois seulement. Il existe aussi une forme d’obsolescence liée au service après-vente qui pousse le consommateur à racheter un produit plutôt qu’à le réparer, en partie à cause des délais et des coûts de réparation.
Ces catégories recoupent ce que Serge Latouche, économiste et penseur de la décroissance, qualifie dans son livre Bon pour la casse ! (2012) d’obsolescence « technique, psychologique ou programmée », ces trois modes étant imbriqués. Parallèlement aux avancées institutionnelles qui visent à éviter les abus et encourager les bonnes pratiques dans la conception des produits, les comportements et habitudes de consommation individuels peuvent déjà évoluer. Face à cette lame de fond, nombreux sont ceux qui, au cœur des FabLabs et du mouvement maker, défendent par les valeurs du DIY la possibilité de lutter contre l’obsolescence programmée. Ils apprennent ainsi à réparer, changer des pièces, bricoler et contourner les logiques de dépendance maintenues par la plupart des grandes marques.
L’impression 3D tient un rôle exemplaire dans cette mission en permettant de fabriquer à très bas coût et sur mesure de petites pièces pouvant remplacer directement tel ou tel fragment cassé. Les Repair Cafés, qui se développent dans le sillage des FabLabs, rassemblent ainsi de plus en plus de visiteurs et proposent de donner une seconde vie aux meubles, électroménager, vélos, jouets, etc. Lieux de transmission des savoir-faire techniques, ces rencontres permettent de mettre au défi certains bricoleurs férus de petites réparations instantanées en les associant à des personnes désireuses de mettre les mains dans les entrailles de leurs machines. Ces rencontres gratuites visent à transmettre un message fort : tout est réparable ou transformable.
Face à un objet en fin de vie, les filières de réemploi et le Réseau des ressourceries peuvent également être de bons points de collecte. Ce sont des lieux de récupération, de valorisation, de revente et d’éducation à l’environnement qui s’inscrivent dans un schéma de gestion des déchets à l’échelle d’un territoire. En recyclant, réparant et valorisant certains objets jugés inutilisables, les ressourceries tissent de nombreux partenariats.
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Fablabs, etc, Les nouveaux lieux de fabrication numérique, de Camille Bosqué, Laurent Ricard et Ophélia Noor, éditions Eyrolles, collection Serial Makers, janvier 2015, 208 pages, 28€.