Spécialiste d’environnements virtuels 3D, Oliver Kreylos a imaginé un système pour embarquer son corps dans l’aventure. A l’aide de 3 Kinect et d’un Oculus Rift, il dessine la possibilité d’immersions plus intenses à l’aide des masques VR.
Certains observateurs estiment que le casque de réalité virtuelle (VR) Oculus Rift est une fuite en avant dans l’écran, à contre-courant de la rematérialisation des contenus. Pourtant, on peut y voir une filiation avec les makers, notamment en ce qui concerne l’écosystème qui s’est développé autour des prototypes en circulation. Y sont désormais associées d’autres technologies pour expérimenter la réalité virtuelle comme un environnement à part entière, connexe à l’espace réel.
C’est notamment la mission que s’est fixé Oliver Kreylos, un développeur californien, qui est le seul – à ma connaissance – à avoir pu ressentir son corps en mouvement dans un environnement simulé. Il s’agit certes d’une version tremblotante de lui-même, traduite par des Kinect… Mais il a pu décrire l’étrange sensation de compter ses abattis dans une simulation.
Capture vidéo 3D avec 3 Kinect, Oliver Kreylos:
Oliver Kreylos a placé trois capteurs Kinect autour de lui, disposés en triangle équilatéral à peu près à deux mètres du point central, en fonction de la taille du sujet. L’expérience était dirigée depuis un ordinateur sous Linux, recevant le flux des Kinect et diffusant pour l’Oculus Rift, plus un serveur externe pour le suivi de la position de la tête et celle du wand, un joystick pour manipuler l’environnement 3D et les menus. Auquel il a fallu ajouter une vue monoscopique secondaire pour filmer la vidéo.
Ceci est mon corps (émulé)
Oliver Kreylos dit avoir immédiatement accepté ses membres émulés comme les siens ; une sensation que les pros de la réalité virtuelle appellent la « présence ». Les sens isolés, le cerveau traiterait les informations délivrées par le masque de réalité virtuelle comme s’il s’agissait de la réalité. Le chercheur disait percevoir son environnement comme solide et trouvait presque « gênant » de pouvoir traverser les objets. Le reste de l’inconfort était induit par la latence ; ces ralentissements qui créent un décalage entre les mouvements de la tête et l’ajustement de l’environnement. Il en résulte une sorte de « mal des transports ».
Ce chercheur dont le métier est de fabriquer des holodecks – dits cave – vient de mettre en ligne une nouvelle vidéo. Cette fois-ci, il a ajouté une nouvelle dimension à sa mise en abîme.
«Watching Myself Building a Molecule», Oliver Kreylos:
Le dispositif est le même mais il s’est filmé en train de fabriquer une molécule dans un espace virtuel, à l’aide de manettes Razer Hydra. Puis, il a relu la scène en playback pour s’insérer à nouveau dans l’espace. Il avait prévu des interactions qui donnent l’impression qu’il communique avec lui-même dans deux temporalités différentes.
Espaces virtuels low-cost
Au-delà de cette performance, Kreylos veut démontrer que l’on peut désormais créer des espaces de travail virtuels low cost. Le logiciel de construction de molécules – Nanotech Construction Kit – est basé sur Vrui VR toolkit, un logiciel open source. Les Razer Hydra coûtent environ 300 euros. Quant à l’Oculus Rift DK2 (350 euros), il devient presque une bonne affaire en regard d’un onéreux téléviseur – ou moniteur – 3D.
Pour sa prochaine vidéo, Oliver Kreylos s’est engagé à concevoir une collaboration en immersion autour d’un même objet virtuel.
Vous pouvez suivre ses expériences sur son blog et trouver ses ressources sur son wiki.