Son équipement ferait rêver plus d’un maker. A Rio de Janeiro vient d’ouvrir le premier fablab SENAI, du nom des centres de formations techniques brésiliens. Ce lieu, accessible aux seuls étudiants en automatisme et simulation du réseau SENAI, préfigure un réseau de labs éducatifs brésiliens.
(Rio de Janeiro, envoyé spécial, texte et photos)
Nous étions à l’inauguration du Fab Lab SENAI à Rio de Janeiro, probablement un des fablabs les mieux équipés que nous ayons pu voir. SENAI est un centre de formation technique financé par une contribution de l’ensemble du secteur industriel. Les élèves formés dans les SENAI, installés dans tout le pays, en sortent avec des diplômes de techniciens de multiples secteurs.
Premier fablab éducatif au Brésil
En France, cette formation équivaut à un bac technique. Les élèves des SENAI y entrent à 14 ans pour en sortir trois ans après. Le SENAI de Rio de Janerio, dans lequel s’implante ce nouveau fablab, est spécialisé dans les formations en « automatisme et simulation ». C’est la première institution d’éducation professionnelle, au Brésil, à créer un fablab en son sein.
Lors de l’inauguration de cet espace de 450m2, le président de la Firjan (la Fédération des industries de Rio de Janeiro) Eduardo Eugenio Gouvêa Vieira a rappelé l’enjeu central de la création de ce lieu : « Créer la première institution d’éducation professionnelle à implémenter un fablab comme stratégie, tant au niveau des processus de formation que pour développer une culture de l’innovation. »
L’implantation physique du lieu n’en est que la partie émergée, elle s’inscrit dans une stratégie visant à repenser les méthodes pédagogiques au sein des instituts de formation techniques dont le fablab SENAI de Rio serait le premier pilote.
Communautés d’apprentissage
Le programme méthodologique présenté, appliqué depuis plusieurs années déjà, est ambitieux : s’appuyer sur la méthode projet pour apprendre dans le contexte, avec des professeurs agissant comme des médiateurs, dans des logiques d’interdisciplinarité et en créant des communautés d’apprentissage.
Pour Bruno Gomes, responsable du programme, « il s’agit d’aller plus loin dans l’autonomie des étudiants pour développer leur créativité afin qu’ils puissent proposer des réponses aux problèmes rencontrés dans les projets industriels ». L’usage du fablab doit permettre d’accélérer la méthode projet déjà en place, en regroupant dans un seul espace l’apprentissage des savoirs et la mise en pratique simultanée de ces savoirs. Le Brésil manque de techniciens qualifiés et l’objectif affiché est de former les nouveaux élèves aux techniques de prototypage rapide, à la fabrication digitale, à la programmation, mais également, de mettre en avant la collaboration et la créativité.
Une initiation de 20 heures et un parcours de 160 heures pour les plus motivés, en groupes de 25 à 30 étudiants, sont mis en place. Le diplôme portera le nom d’« assistante de projetos fablab-maker » (assistant de projets fablab-maker). Cette première année, l’objectif est fixé à 500 étudiants. Seule une partie suivra la formation de 160 heures. Néanmoins, Bruno Gomes rappelle qu’il s’agit d’ouvrir deux autres lieux courant 2015, pour porter le nombre d’étudiants à 1500 en 2016.
Le fablab est doté de gros moyens. On retrouve les différents équipements d’un fablab de type MIT, mais en format XXL. Trois découpes laser grand format, un atelier bois équipé de plusieurs fraiseuses et défonceuses, des dizaines d’imprimantes 3D, dont certaines capables d’imprimer en métal et même en papier (!), ou l’espace électronique rempli de Lego techniques, Little bits, Arduinos, kits de créations… ce fablab ferait pâlir d’envie n’importe quel maker. « Ferait », parce que si cet espace se veut le fer de lance des fablabs dédiés à l’éducation et à la formation technique, en tant que pilote décliné par la suite dans les autres SENAI et en tant que membre du réseau mondial des fablabs, il ne sera pas ouvert au public.
Pourquoi pas? Selon Bruno Gomes, la loi brésilienne, très stricte à propos des étudiants, leur interdit de travailler durant leurs études et même de faire office de « consultants ». L’ouverture du lab signifierait que les étudiants seraient mis à contribution pour aider le grand public. Paradoxalement, dans une autre salle du même bâtiment se trouve l’OpenLab, certes un peu moins bien équipé, mais dont la mission est de recevoir aussi bien des communautés de makers que de proposer des services aux entreprises. Sauf qu’ici, on ne croise pas les étudiants…