Electrolab, le futur plus grand hackerspace européen à Nanterre
Publié le 7 octobre 2014 par la rédaction
Les 120 membres de l’Electrolab de Nanterre travaillent d’arrache-pied pour faire passer leur hackerspace de 150 à 1500 m2 pour leurs machines de récup’.
L’Electrolab n’est pas le plus connu des labs franciliens, loin de là. Sa communication est minimale : un site web au design presque inexistant, une adresse délivrée uniquement par mail, une présence plutôt limitée dans les médias… et pourtant, il est en passe de devenir, d’ici la fin octobre 2014, le plus grand, le plus équipé et, partant, le plus ambitieux des hackerspaces européens. Visite de chantier auprès de ces hackers discrets, qui étaient trop à l’étroit dans leurs locaux. Une opportunité plus tard (le garage et rez-de-chaussée mitoyen de leur local était vide), ils entament des travaux de réfection en mode DiY pour ouvrir au grand public en novembre.
Hackerspace + coworking + bar + …
Le changement de dimension n’est pas que spatial. Pour sa V2, le hackerspace entend diversifier et intensifier ses activités. Une zone de coworking accueillera des TPE ayant un usage des ateliers, quelques dizaines de mètres carrés seront dédiés à des formations (sécurité, utilisation des machines, électronique…), un petit bar occupera un emplacement central (sans licence IV).
L’Electrolab ne sera pas un fablab
L’organisation prend elle aussi un nouveau visage. Ne vivant que des cotisations des 150 membres et des activités hors lab (initiations, ateliers), l’association a voté à une majorité écrasante de ne pas se renommer «fablab» pour garder son statut de hackerspace. « On tient à garder les valeurs de détournement et de liberté technologique des hackerspaces, expliquent en chœur Samuel Lesueur, président de l’association, et Jonathan Rebillard. C’est aussi la raison pour laquelle nous ne mettons pas notre adresse en ligne. On préfère attirer des personnes motivées, désireuses d’apprendre, de s’investir dans une communauté. »
La liberté associative
Les statuts ont été modifiés pour permettre aux entreprises de devenir membres. « Mais nous ne voulons ni mécènes ni clients. On ne veut être dépendants de personne. On tient à pouvoir dire stop », explique Samuel Lesueur, président de l’association. Un fabmanager à plein temps devrait rejoindre l’équipe bénévole en novembre.
Des hackers ouvriers du bâtiment
En pleins travaux, l’Electrolab met ses 1500 mètres carrés de rez-de-chaussée et garage aux normes ERP (établissement recevant du public, catégorie 5 type R pour les puristes). « On a déjà passé 300 heures uniquement à potasser les réglementations, mais on n’a pas le droit à l’erreur. » Si l’équipe de makers était passée par des pros de la remise aux normes, le budget total des travaux aurait atteint 1 à 3 millions d’euros selon leurs estimations. En le faisant eux-mêmes, et grâce au coup de main bénévole de chacun des membres, le coût total (uniquement le matériel donc) devrait tomber à quelques dizaines de milliers d’euros. Tout est à faire, à commencer par le sol. Il faut ensuite casser et monter des murs, câbler tout le réseau électrique, installer une pompe en cas d’inondation, peindre, placer des portes sécurisées… l’Electrolab gère le second œuvre de ses travaux en mode DiY.
Une salle blanche, pour ouvrir des disques durs en sécurité
A terme, l’espace se divisera, outre un petit bar, en zone de coworking, zone pour les projets, zone machines, zone appelée « cathédrale » accueillant la découpe laser à métal, salle blanche (oui, vous avez bien lu), salle grise, salle de chimie… mais pas de zone bois. « On a des machines simples, des scies, une petite fraiseuse, mais un atelier entièrement équipé pour le bois est trop dangereux. Les normes de sécurité sont extrêmement contraignantes », explique Jonathan Rebillard.
Fonderie DiY et ruches connectées
Côté projets, les membres de l’Electrolab comptent déjà à leur actif un système de ruche connectée développé en deux mois par un débutant complet en Arduino, une fusée hybride, un prototype de distributeur de médicaments, des réparations et améliorations de voiture, un système de pass RFID pour l’accès aux différents espaces, des robots, des robots, des robots, des machines de fonderie faite-maison pour bientôt fondre les pièces métalliques d’une imprimante 3D, des drones, des balises maritimes, des imprimantes 3D RepRap à plastique fondu ou à cire… Soit d’innombrables réalisations proposées en open source sur leur wiki. « Le choix d’organiser les visites en amont par e-mail et de les concentrer sur un seul soir par semaine nous laisse du temps pour faire. »
La récup’ industrielle comme méthode d’équipement
En attendant la fin des travaux et l’ouverture des lieux début novembre, les machines sont réparties à droite à gauche. Au long de notre visite estivale, on découvre pêle-mêle : une chambre à vide (« Oui on a récupéré ça aussi. Pour faire de la cristallisation artificielle, ça peut être cool »), un traceur rapporté de Clermont-Ferrand par un ancien publicitaire, « avec les consommables ! »
L’équipement du hackerspace est sans commune mesure. Et n’a pas coûté cher : les membres de l’Electrolab ont un talent certain pour la récup’ industrielle. « Ça coûte beaucoup plus cher aux industriels de faire enlever et jeter une machine que de nous la vendre pour une somme symbolique. C’est comme ça qu’on a récupéré en Allemagne une découpe laser à métal immense pour une bouchée de pain», dit Jonathan Rebillard.
Il se fait tard. Quelques LED clignotent sur la table recouverte de câbles et d’ordinateurs. Les discussions vont bon train sur les utilisations possibles de la chambre sous vide. Pour le moment, la construction de miroirs pour télescope l’emporte. Les derniers passionnés quittent l’entresol à l’heure du dernier RER.
Le site web de l’Electrolab (pas très beau, mais très riche en ressources)
La position du point sur la carte n’est pas l’emplacement exact de l’Electrolab, mais celui de l’arrêt de RER le plus proche, à quelques minutes de marche.
Texte et photos de Quentin Chevrier