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Maker Faire peut mieux faire à Paris

La 1ère Maker Faire Paris s'étendait tout le long du Centquatre. © Quentin Chevrier

Deux petites soudures, et tout le monde est un maker. © Quentin Chevrier

7500 visiteurs ont parcouru les stands de la première Maker Faire Paris, les 21 et 22 juin au Centquatre. Un succès public malgré quelques cafouillages.

Le vide est comblé. Après un ballon d’essai organisé à Saint-Malo en octobre 2013, la toute première édition de Maker Faire Paris s’est déroulée les 21 et 22 juin au Centquatre. L’événement était attendu de pied ferme par la communauté des makers, qui voyaient les Maker Faire sillonner la planète de Hong Kong à Rome en passant par Barcelone sans jamais se poser en France.

La version hexagonale de cette foire à la bidouille ─ qui réunit plusieurs dizaines de milliers de visiteurs aux États-Unis où elle a été créée en 2006 ─ a été co-organisée par le FabShop, qui revendique sa position de “leader français de l’impression personnelle 3D” avec son bataillon de Maker Bot en ordre de marche dans l’espace central. “On dirait un peu l’armée de l’Empire dans Star Wars”, s’en amuse l’un des exposants.

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« Oh Mon Dieu ! » sur le stand du Telefab (fablab, Brest) © Quentin Chevrier

Les 7500 visiteurs (sur 15000 attendus) ont déambulé au gré des prototypes, fablabs et associations, croisant parfois un maître Jedi ou un drone. Le tout largement entrecoupé de revendeurs de scanners 3D, d’imprimantes 3D, de stylos-imprimantes 3D, de fils d’imprimantes 3D… « C’est dommage, ce n’est qu’un outil, mais c’est l’hameçon pour le grand public, l’effet “wahou”, alors qu’il y a tant d’autres technologies et projets méritant tout autant de “wahou”… » se résigne un fabmanager parisien.

Sarah, manager du fablab Maker sur Seine est plutôt « agréablement surprise ». Constatant que l’ambiance du dimanche est « surtout familiale”, elle précise : « Par contre, au cours de la journée de samedi, j’ai rencontré des personnes qui portent des projets intéressants et avec lesquelles il serait intéressant de collaborer. » Du beau monde se croise aussi dans les allées. Même Philippe Starck s’y est attardé.

Les cafouillages

Bienvenue à la ConsoMaker Faire de Paris

Vous êtes un maker ? Si oui, quels sont vos revenus ? © Quentin Chevrier

Leroy Merlin, partenaire de l’évènement, accueillait les visiteurs de manière plutôt abrupte: avant même d’avoir franchi les portes du Centquatre ou d’avoir aperçu l’ombre d’un robot, une équipe d’enquêtrices questionnait chacun sur son appartenance au « mouvement maker », sa spécialité (comprendre, son rayon préféré du magasin), pour finir sur ses revenus mensuels, et bien sûr, son adresse e-mail à laquelle envoyer de la publicité. Un accueil peu chaleureux pour un festival annoncé « fun et familial ».

L’entrée à 15 euros…

Le tarif d’entrée à la Maker Faire Paris a été la cible de critiques, à savoir 15 euros pour le pass d’une journée (8 euros entre 6 et 12 ans, gratuit pour les moins de 6 ans). Aucun tarif étudiant, ni chômeur, ni senior. La Maker Faire de Rome, par exemple, affiche un tarif de 8 euros le pass un jour, un prix descendant à 4 euros pour les étudiants et les mineurs. On est en droit de se demander si un effort sur l’accessibilité ne serait pas à envisager.

Plus de 4000 badges soudés au plomb

C’était pourtant écrit dessus. © Quentin Chevrier

Les organisateurs et Leroy Merlin avaient prévu une animation au succès garanti : s’asseoir à un établi et souder deux LED sur un badge à l’effigie de la mascotte des Maker Faire. Un vrai moment de bidouille accessible à tous. L’idée était bonne, mais mal exécutée.

Le fil d’étain utilisé deux jours durant contient du plomb. Il doit être tenu hors de portée des enfants, et ses fumées ne doivent pas être respirées. Si le personnel encadrant l’animation mettait à disposition des lunettes protégeant contre la projection de pattes de LED, aucune précaution n’était proposée concernant l’inhalation de plomb. C’est d’autant plus dommage que Leroy Merlin connaît ces risques. L’enseigne les détaille même sur son site internet. Pour la prochaine édition, de l’étain sans plomb serait à privilégier…

Pour compter les makers, comptons les imprimantes 3D

Placardée dans les couloirs du Centquatre, une infographie (réalisée par l’agence We Are Social pour le compte du FabShop) synthétisait le « mouvement maker » à l’aide de critères plutôt curieux. Ainsi, We Are Social dénombrait en 2013 « 6907 objets créés de toutes pièces » et « 266 objets réparés ». Il y aurait eu une croissance de 32% du nombre d’imprimantes 3D, de 200% du nombre de scanners 3D.

Nous avons présenté cette infographie aux fabmanagers présents à la Maker Faire. Qualifiée de « plus que discutable, sur le fond comme sur la forme », de « très réductrice et incomplète » ou encore de « bien marrante », l’infographie a suscité de vives critiques (auxquelles nous nous joignons). Tout d’abord, le « mouvement des makers » ne se quantifie pas par dizaines d’imprimantes 3D ou de scanners 3D. Ensuite, le nombre de membres/adhérents semble totalement irréaliste et la notion des « objets créés de toutes pièces » n’a aucun sens dans un lab. Et quand bien même, ces données conduisent à une moyenne de 2 « objets créés de toutes pièces » par « membre/adhérent ». Pas très productifs ces makers… Enfin, c’est une erreur facilement évitable que de vouloir quantifier le « mouvement maker » en interrogeant seulement 29 fablabs en France. La prochaine fois, « faites appel à des connaisseurs » recommande l’un des fabmanagers (surpris de ne pas avoir été interrogé pour cette enquête).

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