Nos pépites à Futur en Seine, la foire à la farfouille parisienne
Publié le 17 juin 2014 par la rédaction
Avec sa thématique 2014 « Made With », Futur en Seine, le « festival de la French tech », du 12 au 22 juin, joue la carte collaborative. Makery a écumé les allées des stands du « village des innovations ».
Futur en Seine, le festival du numérique en Ile-De-France, déroulait sa partie « foire à l’innovation » de jeudi à dimanche dans la cour du Cnam (le Conservatoire national des arts et métiers) et sur les différents étages de la Gaîté Lyrique, au cœur de Paris, avec une débauche de conférences, rencontres, side-projects… et ce n’est pas fini. Le numérique tient une place centrale dans les propositions, qui, tel que l’ont voulu ses organisateurs, est censé faire de ce « festival de la french tech » la vitrine de l’inventivité en terme de design, start-up, innovation et numérique.
Cette année, la théma choisie, « made with », évoquant les fablabs, l’innovation sociale ou encore le partage de compétences, ne pouvait qu’intéresser Makery. Il fallait cependant un peu creuser pour dégager de l’ensemble des stands et propositions la poignée de projets à rapprocher des « labs », qui relevaient authentiquement de l’artistique, de la recherche, du collaboratif.
Conférence « Made With Fablab »
Deux heures autour des fablabs, le 12 juin, ont permis à un public curieux et plutôt motivé de découvrir ou d’échanger autour du projet des Fabriques du Ponant (futur fablab, Brest), de l’Artilect (fablab, Toulouse), de L’Usine (atelier de prototypage et coworking space, Paris) et de Fabmake (fablab, Nantes). Entre présentation des intentions et nouvelles modalités de fabrication (de la conception à la diffusion), les thématiques abordées mettaient l’accent sur les aspects positifs (pour l’économie, le développement local, le social, l’éducation…) des laboratoires de fabrication numérique.
En filigrane cependant, ressortait une problématique posée par la multiplication des lieux tiers (au sens où ils sont entre artisanat, culture, recherche et industrie): les industriels voient tout l’intérêt de raccourcir la chaîne de production, en utilisant les fablabs comme des ateliers de prototypage rapide à bas coût, les makers, eux, poussent à la reconnaissance de leurs pratiques et interrogent la valeur des objets produits dans leurs labs. Pointe une forme d’ambiguïté sur les suites du mouvement: l’esprit du logiciel libre est-il soluble dans l’entreprenariat?
Doudou numérique cherche maker
Justement, Potatoyz est un bon exemple des connexions parfois compliquées mais possiblement vertueuses entre makers et industrie. Ces jouets digitaux en forme de patates manipulables sur écran tactile peuvent être commandés via l’appli (gratuite) pour être imprimés en 3D chez Sculpteo, prestataire de services d’impression à la demande (10 € la petite patate décorée de 4 cm). Limite de fabrication industrielle vite atteinte pour la version en tissu de ces doudous numériques, dont la sortie est prévue en septembre. « Nous n’avons pas encore trouvé de solution satisfaisante, chaque pièce est unique, donc son coût est très élevé, constate Gabriel Picard, directeur artistique du projet. Pour le moment, ce sont deux Américains qui les font à la main, autant dire que c’est compliqué ! » D’où l’idée d’aller voir du côté des makers: « On va faire le tour des fablabs pour imaginer un procédé automatisé pour ces pièces uniques. Je suis certain que c’est là que l’on trouvera des solutions adaptées. »
Jardinier à distance
Le kit Biobot permet de gérer l’évolution de sa plante d’intérieur sous forme d’une mini-serre bourrée de capteurs qui fournit eau, air et lumière tout en permettant de contrôler l’environnement à distance. L’objet se veut avant tout communautaire, chaque usager étant invité à partager méthodes et combinaison de matériel via une appli. De quoi satisfaire à la fois les mains vertes et les amateurs de robotique en herbe.
Biodiversité par l’image – Moins bidouille et plus institutionnel, le projet Pl@ntnet, porté par un consortium impliquant l’Inria (Institut national de la recherche en informatique et en automatique), le Cirad (Centre de coopération internationale en recherche agronomique pour le développement), l’Inra (Institut national de la recherche agronomique) et l’IRD (Institut de recherche pour le développement) est une base de données contributive d’informations sur les plantes sauvages de la flore française. D’entrée, plus de 4.000 espèces sont répertoriées. Finie l’encyclopédie botanique de poche. Grâce à un moteur de recherche visuel ultra-performant, l’utilisateur peut comparer ses photos aux 90.000 images répertoriées. L’idée étant également d’observer l’érosion de la biodiversité.
Le jeu vidéo pour rester zen
Oublier tous ses réflexes de gamer et respirer le plus calmement possible, c’est le seul moyen d’activer, à l’aide d’un casque Neurosky, le personnage féminin à l’écran pour la faire voler jusqu’à la lune (« fly me to the moon », petit clin d’œil à un crooner bien connu). « Changuya’s Moon Festival » est un jeu vidéo développé en 24h lors d’un hackaton organisé en octobre 2013 par la San Jose State University (SJSU) et le fabricant de casque à ondes cérébrales Neurosky (implanté à San Jose), par Cong Lu, Yuanlei Huang, Glenn Pham et John Pham, étudiants du Medialab de la prestigieuse université californienne.
« Changuya’s Moon Festival », qui a remporté le prix du meilleur jeu d’artiste du hackaton, exige de contrôler son état cérébral, d’approcher d’un état de zénitude tout à fait contraire à la norme en matière de jeux vidéo. Pour G. Craig Hobbs, responsable du CADRE Media Lab, créé il y a 30 ans au sein de la SJSU comme labo de recherche autour de la création numérique et des jeux vidéo, le partenariat avec les entreprises hi-tech est naturel. Comme l’est la façon dont le Game Dev Club est ouvert « aux étudiants de tous les départements de l’université ».
Lui-même a développé un jeu avec ses étudiants, en démo à Futur en Seine, interfaçant Google Earth avec un « jeu de paix » (des Ovni aspirent pistolets, fusils, et autres armes du paysage), et ne doute pas que le dernier projet de John Pham (l’un des auteurs du « Changuya’s Moon Festival », développé avec Leap Motion (le contrôleur de mouvements pour mains), aura les faveurs de la prochaine GDC, le grand raout des développeurs de jeux vidéo, avec son combat irréel et drôlissime entre un pigeon et une princesse chinoise, le tout dans une esthétique rétro 2D tout à fait contemporaine.
Le fablab de Dassault Systèmes : l’impression 3D pour tous (les employés)
Au milieu des start-ups et des revendeurs de matériel de prototypage, Dassault Systèmes présentait son fablab interne dédié à l’impression 3D, et sa communauté en ligne dédiée au sujet. « Tous les employés de Dassault ont la possibilité de venir découvrir l’impression et le scan 3D dans le fablab, à condition d’ensuite partager en ligne leurs réalisation sur la partie Madein3D de swym.3ds.com. » Des ingénieurs de l’entreprise sont venus réaliser un drone, des employés impriments des coques de téléphone portable ou encore des cadeaux personnalisés… au moyen de Solidworks, logiciel maison. Mais « on n’empêche personne de travailler avec Sketchup ou 123D-Design ». Si le fablab de Dassault s’ouvre sur internet, un projet porté par une personne extérieure à l’entreprise devra être « particulièrement intéressant pour être concrétisé au fablab ». C’est le cas de Love-by-me : un pendentif en forme de cœur personnalisable, dont le design est fait en ligne et l’impression par Sculpteo.
Ultra-lab, revendeur engagé
Ultra-lab vendait du matériel de prototypage rapide (Arduino, Lilypad, imprimantes 3D…) pour financer ses projets artistiques et documentaires. « Mais la vente nous prend beaucoup plus de temps que prévu », explique l’équipe d’Ultra-lab, répartie entre Madrid et Marseille. Ils ont tout de même réussi à réaliser la série documentaire « Hello Processing » et à animer de nombreux ateliers. 50 professeurs de techno de la région de Madrid ont récemment été formés à Arduino grâce au soutien de la fondation Telefonica et Arduino Verkstadt, pour qu’à leur tour ils fassent découvrir le fameux micro-contrôleur à leurs élèves. En plus des notions d’électronique et de programmation, les enseignants ont été sensibilisés à la méthodologie open-source : l’importance de la documentation des projets et du partage en ligne des ressources.
OpenReflex, souriez à l’open source
Léo Marius a construit un appareil photo argentique pour son diplôme de l’école de design de Saint-Etienne. Bientôt, tout le monde pourra le reproduire. L’OpenReflex est un appareil photo reflex argentique à fabriquer soi-même. Proposé sous la forme d’un kit à assembler, il est également possible de réaliser son Open Reflex intégralement à l’aide d’une imprimante 3D et en achetant pour quelques euros le reste des pièces en quincaillerie. Les photos prises avec les premiers prototypes sont tout à fait correctes. Léo est déterminé à améliorer encore son prototype. Pour l’aider, rendez-vous sur son Kisskissbankbank.
Loungeshare, du mobilier made with déchets
L’upcycling est une forme d’innovation. L’équipe de Loungeshare était là pour le rappeler. Les lampes, fauteuils et bancs exposés sur leur stand se tenaient plutôt en marge du village de l’innovaton, croulant sous les objets connectés, écrans tactiles et autres Oculus Rift. Ils étaient en revanche au cœur de notre thématique « labs »: le temps d’un week-end, Loungeshare rassemble artisants, designers, ingénieurs et créatifs curieux de bricolage dans un lab pour transformer des déchets en mobilier fonctionnel. La 1ère édition a eu lieu dans les ateliers de l’ENSCI, la deuxième s’est déroulée en mars au fablab de la Cité des Sciences à Paris. Les propositions de lieux ne manquent pas pour l’organisation du prochain week-end. Pour en être, rendez-vous sur leur site web.
Inmoov, le robot partagé
Au départ ce n’était qu’une commande de main. La commande n’aboutira jamais mais donnera à Gael Langevin l’envie de poursuivre la construction d’un humanoïde. Il dispose alors d’une imprimante 3D domestique, avec un cube maximum d’impression de 12 cm de côté. Ses connaissances en électronique sont alors encore limitées. Il décide de partager ses plans en ligne. Le succès est immédiat avec des dizaines de milliers de téléchargements. Il découvre ainsi la puissance des communautés open source et se fait aider pour la programmation et la mécanique du corps. Aujourd’hui, il existe environ 130 clônes de Inmoov dans le monde, et Gael compte bien poursuivre l’aventure en s’attaquant à la conception et à la fabrication des jambes du robot. Coût total d’un Inmoov: un peu moins de 1000 euros. (site web)